mardi 22 novembre 2011

Élever un enfant pas tout à fait comme les autres


Mensuel 83e année OCTOBRE 2011
CAF du Val-de-Marne
Le mois dernier, j'ai lu avec beaucoup d'intérêt dans le magazine Vies de famille envoyé par la CAF, le dossier » Élever un enfant différent «

En voici quelques extraits :
» Autisme, handicap physique ou mental, surdité, obésité, précocité, hyperactivité ... les différences sont multiples. Et pour les parents, il y a diverses façons de réagir à cette situation. Même si beaucoup ont en commun de la vivre assez douloureusement, au moins dans un premier temps, et surtout quand il est question d'un réel handicap. " A l'annonce de la nouvelle, c'est le chaos dans la famille qui connaît un véritable traumatisme. Les parents éprouvent toutes sortes de réactions émotionnelles incontrôlables. Ils peuvent ressentir un grand sentiment d'injustice : ' Pourquoi nous, qu'avons-nous fait de mal ? ' Et aussi ressentir de la peur (...) Toutes ces pensées sont parfaitement normales, on n'a pas à en avoir honte. " encourage Maurice Ringler, psychologue*.
(...) Mais quels que soient leurs états d'âme, les parents d'enfants différents doivent bien faire face, inventer au jour le jour une parentalité adaptée à leur bambin pas tout à fait comme les autres. Or, plus que d'autres pères et mères, ils sont guettés par certains pièges. Le premier d’entre eux est sans doute la surprotection. (...) Alors, il faudrait l'éduquer comme si de rien n'était ? Il n'est bien sûr pas question de dénier le handicap mais de ne pas lui accorder toute la place non plus. Un enfant handicapé est avant tout un enfant qui, comme tous les autres, a envie de grandir, de tester les limites qu'on lui pose, qui affectivement connaît les mêmes crises (Oedipe, l'adolescence). Il s'agit donc d'essayer de trouver le juste milieu entre la nécessaire protection dont il a besoin et le fait de le traiter comme tout autre enfant de son âge. (...)  le gâter beaucoup pour compenser les éventuelles difficultés qu'il rencontre à l'extérieur, compatir à l'extrême au point de vivre les choses à sa place ne l'aidera en rien.  Bien au contraire !
(...) Autre écueil fréquent : quand la différence d'un enfant conduit à manquer de partialité au sein de la fratrie. (...) de quoi créer de vraies bombes à retardement ...
(...) Un chose est sûre, avoir un enfant différent exige des parents une énergie énorme car tout est plus compliqué à organiser : sa scolarisation, ses loisirs, ses vacances, son quotidien. Et parfois, les forces manquent ...
(...) Beaucoup de parents d'enfants différents ne se reconnaîtraient pas si nous n'évoquions aussi le formidable enrichissement humain qu'ils retirent souvent de leur parentalité particulière ! (...) " Élever un enfant qui diffère des normes habituelles oblige à se poser de nombreuses questions, à réfléchir à son rôle de parent, à la manière de l'exercer. Cela donne de la profondeur, de l'épaisseur " confirme Nicole Prieur, psychothérapeute d'enfants**.
Respect, a-t-on envie de dire à tous ces courageux parents ... «

Durant sa quatrième grossesse, ma mère avait un pressentiment, la vague impression que quelque chose n'allait pas. Son gynécologue lui a refusé l'amniocentèse, la croyant parano. Ma mère a 34 ans. Au moment de l'accouchement, l'équipe médicale est restée bouche bée. Le verdict est tombé : Trisomie 21 avec malformation cardiaque. Sa fille est trisomique, différente, handicapée, retardée, encore bébé malgré ses 23 ans, » cabossée « comme dirait mon Tibouchon ... 
La vie est cruelle avec mes parents. Après avoir traversé la guerre, quitté leur pays, survécu à la mort de leur tout premier enfant, ils doivent maintenant surmonter le handicap de leur petite dernière. A l'annonce de la nouvelle, mes parents sont anéantis ... mais il faut faire face, il n'y a plus le choix maintenant. Oui, face à cette épreuve, il y a ma mère, mon frère et moi ... Mon père s'est perdu en route, il a démissionné, quitté le navire, abandonné la troupe, nié l'évidence. Il n'a pas pu accepter que l'un de ses enfants ne soit pas normal, c'était sûrement au-dessus de ses forces de pouvoir aimer cette enfant autant que les autres. C'est d'ailleurs l'une des raisons qui ont conduit au naufrage de leur couple. Alors, ma mère a compensé pour deux. Elle l'a choyée, entourée, gâtée, surprotégée, cajolée, chouchoutée, dorlotée. Tout était excusé par un " Mais elle est handicapée, alors si ça peut lui faire plaisir ... " ou " Tu vois bien qu'elle est handicapée, elle ne peut bien évidemment pas faire ci ou ça ! "
Mes parents travaillaient 14 heures par jour et n'étaient quasi jamais là. Etant l'aînée, j'ai dû prendre en mains mon frère et ma soeur. Faire l'éducation à la place d'une maman débordée et d'un papa démissionnaire. Est-ce que ça a fait de moi une " bombe à retardement " ? Peut-être ...
Notre combat quotidien depuis ces 23 dernière années, c'est de supplier pour une prise en charge, de mendier une place à l'école ou dans un foyer de vie (même pas en France mais en Belgique !), courir après les papiers, faire les examens médicaux, remplir des dossiers interminables, attendre quasi sans fin les résultats de commissions pour décider si elle a droit à telle ou telle chose.
Aujourd'hui, je suis partie du nid pour fonder ma famille. Elle assure toujours comme mère et maintenant, comme grand-mère, même si elle est fatiguée. Malgré quelques coups de mou de temps en temps ... souvent ... malgré tout, elle continue à aimer sa fille » cabossée « et à se battre avec courage pour elle au quotidien.

Alors oui, maman ... Respect !


* Auteur de Comprendre l'enfant handicapé et sa famille, Dunod
** Auteur de Petits règlements de comptes en famille, Albin Michel



4 commentaires:

  1. mon fils est autiste et en plus de l'éducation et des soins un tout petit peu plus compliqués par rapport à un enfant traditionnel, on passe notre temps en réunion, dossiers à monter, rendez vous médicaux. Il en faut de l'énergie ;-)

    RépondreSupprimer
  2. Brenda,
    Je te tire mon chapeau parce que l'autisme, ça doit être plus difficile à gérer encore que la T21 (enfin, je pense). Je te souhaite encore beaucoup de courage pour tous les jours !
    Plein de belles pensées pour toi et ta famille :)

    RépondreSupprimer
  3. quelque soit le handicap, je pense que le parcours est difficile. Et comme le dit Brenda, beaucoup de réunions, de montage de dossiers, obligation de justifier en permanence, un parcours du combattant que vous devez mener, vous, les familles d'enfants ou adultes en situation de handicap.
    Je travaille dans ce "milieu" avec pour objectif "d’alléger" ce parcours, à vous, la famille.
    Alors, respect à ta maman, à toi, à Brenda et à toutes ces familles dont le quotidien est parsemé d'embuches mais aussi de bonheur, de sourire et de victoires si petites soient elles.

    RépondreSupprimer

Fais des bulles, toi aussi ...